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Un nouveau paysage énergétique est possible à la condition de s’en donner les moyens

La sortie du nucléaire passe aussi par le développement de centrales à gaz


Par Christophe KERGOSIEN

Rennes, le 24 mai 2011



Hier, Three Mile Island, Tchernobyl, aujourd’hui Fukushima ... la production d’électricité d’origine nucléaire est belle et bien dangereuse ! Affirmer le contraire serait pour le moins étonnant, diminuer la portée du risque sous l’angle d’une analyse des avantages comparatifs reviendrait une fois de plus à s’enfermer dans un posture d’experts aux prises avec des citoyens guidés par leurs seules émotions irrationnelles ! Il ne s’agit donc pas tant, comme le gouvernement le propose en France,  de rassurer la population par la réalisation d’un audit des centrales de production que d’ouvrir un débat démocratique, qui n’a jamais eu lieu, sur l’avenir énergétique de la France, et  plus loin de l’Europe, le marché étant désormais dérégulé à cette échelle.


Nous ne discuterons pas ici de la finalité d’une telle démarche. Doit-elle ou non se conclure par un référendum ? Certains, comme Dany Cohn-Bendit, http://dai.ly/kg4iQG le réclament en affirmant que c’est aux partisans de la sortie de nucléaire de développer de bons argumentaires pour convaincre l’opinion. D’autres pointent le risque d’un tel processus : et si la filière nucléaire en sortait renforcée ? D’autres encore n’y songent même pas, il n’y a pas débat, encore moins de référendum possible, le nucléaire est un choix à conforter et ce d’autant plus que la lutte contre le changement climatique est la priorité ; on peut au mieux réévaluer sa part dans le mix énergétique français.


Un sujet qui dépasse le clivage droite/gauche


Cette discussion, très animée au lendemain de la catastrophe de Fukushima, reste passionnée. Elle dépasse la traditionnelle frontière politique gauche-droite mettant plutôt aux prises écologistes et productivistes, qu’ils soient de droite ou de gauche. Europe Ecologie Les Verts et sa secrétaire nationale, Cécile Duflot, font d’ailleurs de la sortie du nucléaire un élément incontournable de la négociation en cours avec le Parti Socialiste, en vue de la présidentielle et des législatives. Un préalable comme peut l’être d’ailleurs le projet aéroportuaire de Notre-Dame-des-Landes ou d’autres projets d’infrastructures ! On imagine dès lors très bien les difficultés à s’entendre sur le choix des mots et la réalité qu’ils revêtent, une entente est-elle d’ailleurs possible ?


La France n’est pas l’Allemagne où le terreau écologiste est beaucoup plus solide avec des Grünen qui, après avoir fait cause commune avec les sociaux-démocrates, jouent désormais le rôle d’un parti charnière capable de faire ou de défaire des majorités, de gauche comme de droite puisque les Verts allemands ne rechignent pas à participer à la gestion de la chose publique avec les Démocrates-chrétiens (doc.1 L’avenir des verts allemands vers un parti charnière doc1lavenirdesvertsallemandsversunparticharniere.pdf). Il y a donc bien deux poids deux mesures entre ces pays voisins. On a pu encore s’en apercevoir suite à la catastrophe de Fukushima avec des manifestations écologistes massives Outre-rhin à un moment où la Chancelière Angela Merkel envisageait de revenir sur le « consensus atomique » de juin 2000 dont une loi de 2002 fixe les termes (doc.2 La politique énergétique allemande  doc2lapolitiqueenergétiqueallemande.pdf). Elle a été contrainte de céder à la pression de la rue et finalement de réaffirmer le choix original de l’Allemagne à l’échelle européenne.


Une problématique incontournable, la sécurisation de l’approvisionnement


En France, nation du nucléaire et fleuron mondial de cette industrie, nous n’en sommes pas encore là ! Loin s’en faut. La question à laquelle il conviendrait de répondre porte sur le processus et le calendrier d’une sortie du nucléaire pour, au-delà des discours crédibiliser cette possibilité aux yeux de l’opinion publique. S’appuyer sur le développement des énergies renouvelables et les économies d’énergies ne constituent pas en soi une réponse suffisante. Il suffit pour s’en rendre compte de prendre le temps d’observer la politique énergétique allemande. Que constate-t-on ? Que la part des énergies renouvelables progresse dans le mix énergétique global mais que la fourniture d’électricité d’origine fossile reste stable pour des raisons de sécurisation de l’approvisionnement avec, de plus en plus, une part prépondérante pour le gaz.

En Allemagne, en 2009, pays de la sortie du nucléaire, l’électricité provient toujours à 44 % du charbon, à 2 % du pétrole, à 23 % du nucléaire, à 13 % du gaz naturel et à 18 % des renouvelables (http://www.enercoop.fr/index.asp?id=554).


Autre exemple, le Royaume-Uni qui en une décennie est devenu le champion de la production d’électricité à partir d’éoliennes en mer. Cette performance est incontestable mais il convient de la relativiser à la lecture du mix énergétique britannique où là aussi la part d’électricité d’origine fossile reste prépondérante dans un pays qui prévoit l’électrification généralisée des systèmes de chauffage et des transports, avec une hausse de la consommation électrique évaluée entre 74 et 130 % en 2050 (doc. 3 la place de l’éolien dans le mix énergétique britannique  doc3laplacedeleoliendanslemixenergetiquebritannique.pdf). Rien n’est donc si simple !


Accepter la voie de la transition énergétique…


Dans un contexte de raréfaction des sources énergétiques mondiales, énergies sur lesquelles ont reposé le développement et le mode de vie des sociétés occidentales, et dans le cas très particulier de la France, la problématique de la transition énergétique est essentielle (lire à ce sujet l’approche dialectique présentée par Daniel Cueff). La rupture est techniquement impossible, politiquement compliquée. Il faudra donc du temps et faire oeuvre de compromis pour ne pas dire de pragmatisme dans l’écriture des scénarios de sortie nucléaire.


L'exemple breton est à ce titre intéressant. La réalisation des objectifs du Pacte électrique signé entre l'Etat, la Région et les collectivités bretonnes (doc. 4 Le Pacte électrique breton doc4lepacteelectriquebreton.pdf) permettra dans un avenir proche, 2020, de compter sur 35 % de production électrique renouvelable issus de ce territoire. Ce sera autant d'électricité de base d'origine nucléaire en moins. Et il n'est pas interdit de penser que les objectifs d'économies d'électricité permettront après 2020 d'inverser la courbe croissante de la consommation de notre région, à confort égal dans une logique de sobriété.


Bien entendu, certains écologistes, à commencer malheureusement par Europe Ecologie Les Verts, ne portent pas le même regard sur ce Pacte parce qu'il mentionne la construction d'une centrale à cycle combinée gaz dans le Finistère. Mais sans cette centrale, pas de sécurisation de l'approvisionnement électrique dans une région cruellement déficitaire en période hivernale, au moment où l'appel de consommation est le plus important ! Sans elle, point de plan de développement des renouvelables et d’économies d’énergie ! Ce Pacte est pourtant un compromis cohérent avec le refus des Bretons de voir s’implanter sur leur sol une centrale nucléaire. Refus jamais démenti depuis Plogoff !


…ou risquer de renforcer le puissant lobby nucléaire


Souvenons-nous qu'en 1999, M. Bernard Laponche (http://www.global-chance.org/spip.php?article7), physicien nucléaire et alors conseiller énergie de Mme Dominique Voynet, Ministre de l'Environnement, prônait un triptyque similaire -développement des renouvelables, économies d'énergie, construction d'une CCG- pour éviter la saignée du parc du Verdon par une ligne à Très Haute Tension ! « Un tel programme régional fort d’économies et de maîtrise de l’énergie, associant tous les acteurs et la population, serait une première exemplaire en France, tandis que EDF serait aussi pionnière en construisant une centrale à gaz à cycle combiné », disait-il alors (doc. 5  Des alternatives à la HT dans le Verdon, par Bernard Laponche     doc5desalternativesaHTdansleverdonparbernardlaponchecommuniquemars1999.doc). 

M. Benjamin Dessus (http://fr.wikipedia.org/wiki/Benjamin_Dessus), ingénieur et économiste, tout comme M. Laponche qui produisent ensemble et avec d'autres de nombreuses études et informations sur l'énergie sur le site de l’association scientifique Global Chance (http://www.global-chance.org/index.php), ne dit pas autre chose (http://www.centpourcentnaturel.fr/post/2011/05/05/Debat-Sortir-du-nucleaire-c-est-possible) : oui l'alternative au nucléaire est possible ; elle repose bien sur le développement des économies d'énergie et des renouvelables, et sur le développement de quelques unités de production au gaz pour assurer la transition. Voilà ce qui constitue un scénario possible à discuter avec le Parti Socialiste dont le candidat est encore à ce jour le seul à même à gauche de remporter l’élection présidentielle.


La lecture très instructive de la situation allemande nous montre bien qu'il sera difficile de faire autrement sauf à vouloir donner les meilleurs arguments aux nucléocrates de notre pays pour qu’ils concluent à l’impossibilité d’une sortie du nucléaire ou à une sortie non souhaitable dans un contexte énergétique et climatique mondial très tendu avec des prix à la consommation qui s’enflamment.  



L'écologie et

la dialectique

par Daniel CUEFF

Conseiller régional délégué à l’écologie urbaine


La première année de notre mandat de conseillers régionaux de Bretagne Ecologie a été marquée par la signature du Pacte électrique breton. Celle-ci a soulevé la réprobation des milieux écologistes dits autorisés ...

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2 paysans de FUKUSHIMA à Fougères


18/05/2011















Ces deux hommes sont Shinpei MURAKAMI et Toshihide KAMEDA.


Paysans respectueux de la Terre, ils ont dû quitter leurs terres qu’ils aimaient tant.


Non pas à cause de la catastrophe naturelle, mais pour ne pas mourir de la radioactivité déposée par la centrale nucléaire de Fukushima.


Ils ne voulaient pas abandonner ce qui était leurs vies mais ils ont dû s’y résigner.


Ceci est d’autant plus révoltant qu’ils s’étaient opposés au nucléaire.


Jamais Shinpei n’aurait imaginé se retrouver en France : « le pays dont 80% de l’électricité est nucléaire ».


A choisir, il serait plutôt allé « en Allemagne pour voir le futur ».


Ni TEPCO, ni le gouvernement japonais, qui se renvoient la balle, n’ont encore versé la moindre indemnisation aux réfugiés nucléaires qui ont dû abandonner leurs vies d’avant Fukushima.

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